Le syndrome de Wiedemann-Beckwith

Le syndrome de Wiedemann-Beckwith

Le syndrome de Wiedemann-Beckwith (SWB ; OMIM 130650) est un syndrome de croissance excessive prédisposant au développement de tumeurs embryonnaires, qui concerne environ 1/13 000 naissances (fréquence probablement sous-estimée).

L’expression phénotypique du SWB est très variable. Les trois signes cardinaux classiques du SWB sont la macrosomie néonatale souvent associée à une avance staturale postnatale (nécessitant un suivi endocrinien), la macroglossie (nécessitant un suivi maxillo-facial) et les troubles de fermeture de la paroi abdominale (diastasis des droits, hernie ombilicale ou surtout omphalocèle qui nécessite une prise en charge chirurgicale dans les premiers jours de vie).

Les autres signes cliniques sont une viscéromégalie sélective (intéressant les reins, le foie, la rate et le pancréas), des anomalies des oreilles à type de fistules auriculaires et d’incisures des lobes, des hypoglycémies en période néonatale (qui ne doivent pas être méconnuee pour être traitéee efficacement et éviter tout dommage cérébral), un angiome plan frontal et une hémihypertrophie (qui nécessite un suivi orthopédique).

La préoccupation majeure des médecins prenant en charge les enfants atteints du SWB est le risque tumoral. En effet, 7,5 à 10 % des enfants présentant un SWB vont développer une tumeur au cours des premières années de la vie, en général avant l’âge de 5 ans. Il s’agit le plus souvent de tumeur de Wilms ou néphroblastome, mais aussi d’hépatoblastome, de corticosurrénalome, de neuroblastome ou de rhabdomyosarcome.

Le diagnostic basé sur les signes cliniques (il est généralement accepté de retenir au moins trois signes dont 2 majeurs) peut être difficile car ceux-ci sont souvent dissociés. Il est nécessaire cependant devant un nouveau-né présentant une symptomatologie, même modérée, de ne pas méconnaître ce diagnostic, compte tenu du risque tumoral potentiel.

Les analyses moléculaires de la région chromosomique 11p15, soumise à empreinte parentale (où sont situés des gènes contrôlant la croissance et le cycle cellulaires tels que IGF2, H19, KCNQ1OT1, CDKN1C) ont permis d’apporter une aide précieuse au diagnostic et au pronostic.

Le SWB est secondaire à une anomalie épigénétique (troubles de la méthylation de la région ICR2/KCNQ1OT1 ou de la région ICR1/H19) ou génétique (isodisomie paternelle ou mutation du gène CDKN1C) de la région 11p15, conduisant soit à une surexpression de gènes ayant une action proliférative (en particulier IGF2) soit à une perte d’expression de gènes ayant une action anti-proliférative (comme H19 et CDKN1C).

L’exploration d’une très large cohorte d’environ 300 patients présentant un SWB a permis d’établir des corrélations génotype/phénotype très précises. Ceci permet de cibler très précisément les patients à risque tumoral élevé (pour la surveillance) et les familles à risque de récurrence (pour le conseil génétique). Une surveillance individualisée est ainsi proposée selon le résultat moléculaire.

Ainsi la prise en charge des enfants présentant un SWB doit être multidisciplinaire : malformations de la face et de la macroglossie en chirurgie maxillo-faciale, malformations rénales éventuelles en néphrologie et chirurgie viscérale, trouble de la croissance staturale en endocrinologie et orthopédie, et éventuelles tumeurs en radiologie, oncologie et chirurgie viscérale. Les services de chirurgie viscérale (omphalocèle), de réanimation néonatale et endocrinologie (hypoglycémies) sont amenés à s’en occuper dès la naissance, en urgence.

La prise en charge optimale nécessite un diagnostic moléculaire qui permet d’adapter la surveillance du risque tumoral. Ces analyses moléculaires sont réalisées dans l’unité de biologie moléculaire d’endocrinologie à l’hôpital Trousseau à Paris.